Sunday, June 5, 2016

Le sujet humain naît et grandit dans un état de dépendance à peu près totale et, à considérer comment la plupart, la très grande majorité des êtres humains mènent, choisissent de mener ou acceptent (en raison de contraintes subies, voulues ou accueillies) de mener leur vie, on est comme obligé de conclure qu'il n'y a rien que les êtres humains (Dieu merci! il n'y a pas que des êtres humains sur terre) aiment tant que de végéter ou de se prélasser dans un état de dépendance, de servitude même. Faut-il y voir une forme de régression au stade infantile? Je tiens qu'il s'agit plutôt d'une forme de perversion due à l'humaine tendance à la paresse.

L'aspiration au confort, dont on pourrait, non sans raison, penser que c'est le propre des classes aristocratiques ou, même élevées---les aristocrates ne sont bien souvent que des aristocrates  de l'argent---, la particularité de ceux qu'écoeurent les sordides mesquineries que le hasard sème sur les chemins de l'existence et auxquelles condamne l'absence de rigueur dans la conduite de sa vie à soi, n'est au fond et malheureusement peut-être qu'une litote servant à sublimer la paresse, voire la volonté de mort, d'autodestruction  dont elle est l'expression foncière; mais que peut bien désirer le vivant d'autre que la mort?

Les êtres humains seuls se, d'une manière ou d'une autre, tuent eux-mêmes , mais pas les animaux, ni les plantes, qui, eux, meurent; du moins dans l'état actuel de nos connaissances.Est-ce la preuve de la supériorité de l'être humain par rapport aux autres vivants?

Il se tue, se donne la mort, mais c'est pour ne pas mourir, pour ne point subir passivement sa mort.

Qu'est-ce que la mort donnée---et non infligée---à soi-même sinon un acte suprême de libération, 'le seul acte réussi' disait Lacan après Freud.

On se veut d'autant plus libre qu'on se sait ne pas l'être: on aime bien substituer la comédie à la réalité, jusqu'à ce qu'on découvre autre chose.

Friday, June 3, 2016

Le comportement humain est au moins souvent irrationnel, mais jamais incompréhensible et surtout pas inexplicable.

On peut expliquer et même comprendre, mais sans pour autant approuver ni, non plus, accepter.

Pourquoi s'étonner qu'un nigaud se croie intelligent? N'est-ce pas un nigaud après tout?

On balance des énormités le plus souvent parce qu'on est con; mais aussi par complaisance, et c'est peut-être plus grave encore.

Ils sont nombreux, très nombreux même à vouloir parler de ce à quoi ils n'entendent rien et ne peuvent rien entendre; que voulez-vous? Il faut bien qu'ils n'aient pas l'air trop con, mais malheureusement pour eux, ce n'est pas ce qui changera quoi que ce soit.

Le silence dans la discussion ne signifie pas que l'on n'ait rien à dire; pas toujours.  On se tait bien souvent parce qu'on s'ennuie, parce qu'on n'en a rien à foutre et, surtout peut-être, parce qu'on se sent trop fatigué.




Thursday, June 2, 2016

On est toujours insuffisamment honnête et toujours trop malhonnête, mais on peut douter que tous ceux qui se disent honnêtes et tous ceux qui ne se devinent malhonnêtes soient d'accord.

Les gens diaboliquement malhonnêtes se doivent de penser  que les autres ne sont pas moins malhonnêtes qu'eux. Quel réconfort cependant! Seuls ceux qui sont à l'extrême malhonnêtes s'en pourraient  contenter.

Ceux qui sont malhonnêtes ne peuvent pas ne pas savoir qu'ils sont de véritables pourritures, mais ils ne savent pas qu'ils le savent, ou n'en veulent rien savoir.

Il ne faut croire sur parole toute personne qui se dirait allergique à la malhonnêteté, non qu'elle soit forcément malhonnête, mais parce qu'une personne qui entretient un idéal d'honnêteté n'éprouve aucunement le besoin d'en parler et parce que quiconque se dit allergique à la malhonnêteté peut très bien le faire pour des raisons que tout le monde peut deviner.

Il y en a pour qui la malhonnêteté est une expression d'intelligence et qui n'hésitent pas à s'en vanter. Ce ne sont que des fumiers, mais ils ne sont peut-être pas aussi méprisables que ceux qui les approuvent et les encouragent.

Faut-il rendre aux gens malhonnêtes la monnaie de leur pièce?  Rien n'est moins sûr; le mépris devrait suffire, un mépris calculé et cruel, si le mépris n'était lui-même un objet de mépris.












Le philosophe essaie de comprendre, mais on croit qu'il cherche à expliquer, quand on ne se dirait que comprendre et expliquer, c'est, ce serait au fond la même chose.

On pourrait penser que pour expliquer, il faut avoir compris; c'est peut-être juste, peut-être seulement, mais encore faut-il que celui qui s'efforce de comprendre soit assuré d'avoir compris.

A moins qu'on ne soit d'avis que, pour comprendre, il faut d'abord expliquer ou s'expliquer; ce pourrait sembler l'évidence même, mais à la condition d'entendre expliquer non moins que s'expliquer au sens de se confronter avec, et l'on ne sera alors jamais tout  à fait prêt à en finir avec l'exercice en question.

Que c'est rassurant, du moins pour certains, de croire, de penser qu'on a compris, qu'on a tout compris de préférence! Cela dispense de continuer de chercher à comprendre.

Pour comprendre, si tant est qu'on comprenne jamais quoi que ce soit, il faut s'éloigner, fermer les yeux et se boucher les oreilles, tout en gardant à l'esprit que même là on ne sera jamais sûr de comprendre.

Comprendre, c'est prendre avec; on le savait auparavant, mais il faut croire que depuis on a évolué.