Friday, August 29, 2014

Bien des gens, parce qu'ils utilisent les mêmes mots, les mêmes expressions que souvent ils empruntent à des poètes, à des philosophes, croient qu'ils évoquent les mêmes concepts, songent aux mêmes choses qu'eux, et en viennent même à se convaincre d'être aussi profonds et talentueux que les poètes et philosophes en question.

L'écrivain, parce qu'il écrit, ne s'exprime pas; pourquoi le ferait-il, vu qu'il ne manque pas de nigauds pour cela?

Il pratique peut-être la même langue que celle par tant d'autres utilisée, si tant est que cela existe, une langue qui soit une, mais son langage à lui, qui, il est vrai, n'est pas que son langage à lui, est foncièrement inédit.

Monday, August 18, 2014

Il y a ceux qui savent ce qu'ils veulent, ou du moins croient savoir ce qu'ils veulent jusqu'à ce qu'ils découvrent qu'ils croyaient seulement savoir ce qu'ils veulent, et il y a ceux qui ne savent pas ce qu'ils veulent: ces derniers au moins savent qu'ils ne savent pas.

On condamne, à juste titre semble-t-il, tout excès, mais l'excès, n'est-ce pas ce dont le sujet humain, tout sujet humain est rigoureusement incapable? A moins que tout, le moindre geste compris, ne relève de l'excès? Mais alors,  il n'y a pas d'excès.

Etre digne et noble en toute circonstance, règle qu'il est peut-être plus difficile de vouloir observer que d'observer à proprement parler.







Sunday, August 17, 2014

Il est toujours trop tard pour faire quoi que ce soit, mais ce n'est certainement pas une raison pour ne rien tenter.

Sans doute ne faut-il chercher à déplaire à autrui, mais il ne faut non plus craindre de déplaire à qui que ce soit, non seulement parce que ladite crainte signifie une attitude, ou une réaction, de faiblesse peu compatible avec l'idée qu'on peut se faire de la dignité personnelle, mais surtout parce que, pire encore, elle peut se révéler riche en conséquences dramatiques pour soi et, peut-être même, pour les siens.

Le plaisir, il n'y a rien de plus sérieux, et, pour peu qu'on n'en soit pas convaincu, on tâchera au moins de faire en sorte que ce qui passe pour austère à ses yeux soit une source de plaisir.

Les dégénérés croient qu'il faut souffrir, de préférence horriblement, pour être heureux: ma foi! s'ils se contentaient de juger cette souffrance indispensable pour eux seuls, pourquoi pas après tout? Mais non, car, comme ce sont également des gens qui songent au bonheur des autres, ils voudraient que tout le monde souffrît atrocement, convaincus qu'ils sont que le bonheur pourra alors régner sur la terre.

De même que l'intelligence n'est intelligente que si elle est également, et forcément, belle, la beauté n'est vraiment belle qu'à la condition d'être intelligente.

Vivre pour travailler, cela n'est acceptable que si le travail est synonyme de plaisir, de bonheur même. Je veux bien croire que Sixtine ait été pour Michel-Ange un bonheur absolument indicible, mais qu'on ne vienne pas dire que les Pyramides furent une joie immense pour ceux qui y travaillèrent!






Saturday, August 16, 2014

La plupart des gens sont si cons, si ignorants, si malhonnêtes, égoïstes et paresseux, qu'il se faut bien étonner que ceux qui ne sont pas comme eux puissent tolérer qu'ils existent.

Ce qu'on croit souvent être une expression de générosité est en fait un témoignage d'égoïsme.

Il y a des gens qui ont su faire de l'altruisme la forme suprême de l'égoïsme.
L'écrivain brûle toujours ce qu'il écrit, tout ce qu'il écrit, mais seuls ceux qui savent lire sont conscients de cela.

De même que l'écrivain, le lecteur, lui aussi, lit sur une page blanche.

Un écrivain, c'est peut-être même tout le contraire de quelqu'un qui accepte que ce qu'il écrit soit rendu public.
On n'est jamais, soit parce que l'on sous-estime, soit parce que l'on exagère ses qualités à soi, sûr de savoir ce qu'on peut faire, ce qu'on est en mesure de faire,  on ignore ce qu'on doit, ce qu'on a, aurait réellement l'obligation de faire (quand on ne cherche à l'ignorer), mais on a l'air convaincu de savoir ce qu'on veut.

Il n'est probablement point inexact que l'individu humain ne change pas, demeure toujours tel qu'il était, et dont il ignorait presque tout bien souvent, et s'il est indéniable qu'il n'est pas tout le temps inspiré par les mêmes motivations et que ses aspirations sont si variées, qu'il méprise aujourd'hui ce qu'il adorait hier, c'est peut-être, c'est sans doute qu'au fond il ne sait jamais vraiment ce qu'il veut.

Faire en sorte que ce qu'il veut, et rien d'autre,  soit  ce qu'il doit, et qu'il ait les moyens de ce qu'il veut, telle est la devise d'un être libre, d'un être qui se respecte.




Thursday, August 14, 2014

Bien pire encore qu'une vie passée à ne rien faire est celle consumée dans des actions douteuses, inutiles et, même , honteuses.

Perdre son temps, dilapider sa vie, le péché ultime que rien ni personne ne sauraient absoudre.

On ne ne peut excuser, ou plutôt, il faudrait pouvoir excuser cela seul  qui est absolument inexcusable, et c'est, bien entendu, impossible, et parce que c'est impossible, il faut d'autant plus y travailler.
La maladie, ce n'est pas la vie elle-même, c'est la vie dans les conditions habituelles qu'on lui connaît et qu'on a fini par trouver ou juger naturelles.

La maladie la plus grave, c'est celle, quotidienne, dont on souffre sans même le savoir, avec aux lèvres le sourire d'un aliéné au fond d'un asile psychiatrique., encore qu'il faille se demander si l'aliéné, lui, n'en sait pas plus sur la nature de la maladie que les médecins qui, presque tous sinon tous, ont l'air d'ignorer que leur tâche ne consiste pas tant à soigner une pathologie, qu'à guérir une personne qui souffre.

Qu'est-ce que la maladie sinon le désir, inconscient bien sûr, de fuir la vie que l'on mène, le désir de s'en protéger?

C'est parce que l'on n'est pas satisfait de son existence que l'on se donne la mort, pour en finir avec cette vie qui n'en est pas une et pour, éventuellement, enfin commencer à vivre vraiment, ou du moins autrement.

On n'a même pas à (se) si l'on doit ou si l'on peut être malhonnête vis-à-vis de ceux qui ne sont pas honnêtes: Kant a déjà répondu à ces questions et il n'y a pas à y revenir.





Friday, August 1, 2014

On trouverait sans peine intelligent le dernier des tarés pourvu qu'il flatte son ego à soi.

Sous l'éloge, le sarcasme bien souvent: ne pas s'y laisser prendre.

On accepte volontiers tout compliment, alors que l'on devrait s'en sentir offusqué, et ce même quand le compliment en question, aucunement injustifié, est indubitablement sincère, car il ne peut qu'être le fruit âcre d'un malentendu.




Comment peut-on passer le plus clair de son temps à ne rien faire de bon, ni même d'agréable et prétendre aimer la vie?

Afin de pouvoir vivre, il faut apprendre à se mettre au-dessus des autres, peut-être même à les dominer, en tout cas à ne pas se laisser atteindre par eux, et c'est d'autant plus difficile qu'on ne se donne même pas le temps d'y songer.

On peut tout accepter, sauf l'injustice: c'est ce que l'on est tenté de croire, mais c'est ce dont presque rien ne fournit la preuve, vu que ce que les uns et les autres entendent par justice n'a le plus souvent rien à y voir.