Thursday, August 6, 2015

Monsieur le minus, qu'est-ce que l'on regrette que vous ne soyez pas, comme le sont bien souvent ceux de votre espèce, un con absolu! On pourrait alors vous aisément excuser et, même, pardonner. Mais vous n'êtes pas un con; n'en déduisez cependant que vous êtes diablement intelligent. Quoique vous ne soyez pas entièrement con, vous l'êtes suffisamment pour vous croire un foudre d'intelligence.S'il suffisait que l'on se crût intelligent pour l'être, les asiles d'aliénés seraient remplis d'individus supérieurement intelligents. Tel n'est, Dieu en soit loué! point le cas. Quant à vous, dont on reconnaît que vous n'êtes pas un con absolu, bien que minus, vous n'êtes pas intelligent non plus. Certes, vous avez étudié, vous pouvez vous vanter de votre parcours académique; mais vous n'êtes que rusé C'est par la grâce nauséabonde de votre seule ruse que vous avez acquis une fortune colossale, conquis un pouvoir démesuré et jouissez d'une notoriété, que vous tenez pour synonyme de gloire, bien évidemment, con comme vous l'êtes, et qui, dans quelques années aura été complètement effacée de la mémoire de tous, y compris de celle de ces laquais qui, pour l'heure, vous admirent encore.
Bien que vous ne soyez pas entièrement con, vous ignorez tout de la noblesse; vous avez la simplicité et la bassesse de croire que le pouvoir ne sert qu'à dominer et ne vaut que s'il permet de s'enrichir à la sueur et dans le sang et les larmes des pauvres et des démunis. L'honneur vous est un territoire étranger et vous n'êtes courageux que quand la partie est gagnée d'avance De tout cela le soupçon ne vous même effleure; vous avez la conscience, ce qui en tient lieu chez vous, tranquille; persone ne s'étonnerait d'apprendre que vous êtes convaincu d'être quelqu'un de vertueux et, bien entendu, d'intelligent.
Pourquoi s'en étonner  en effet? Vous n'êtes qu'un minus; si vous pouviez vous contenter de demeurer le dmeuré, le minus que vous êtes, ce serait, quoique inespéré, presque bien. Il faut cependant craindre que le seul rôle de minus ne vous suffise et que vous vouliez bien ajouter à votre palmarès celui de salaud, mais non celui de fumier, auquel vous n'avez , d'ailleurs, pas à aspirer, vu que fumier vous l'êtes déjà.
Ah, Monsieur le minus, Monsieur le minus, on ne vous méprise même pas, mais vous n'en savez rien; vous ne faites même pas rire; vous n'inspirez tout au plus qu'un constant dégoût; mais direz-vous, peut-être, il y en a qui vous admirent. Ne croyez pas que ceux-là vous admirent tous; certains d'entre eux font seulement semblant de vous admirer. Et quant à ceux qui vous admirreraient effectivement, on ne vous laissera même pas le soin de deviner si ce sont des corbeaux ou des hyènes.

Détrompez-vous, ma belle; vous n'êtes pas si belle que vous le croyez. Personne ne vous peut accuser de ressembler à une guenon, il est vrai, mais vous n'êtes que moyennement belle. Ce n'est déjà pas mal, ce serait même très bien, si vous ne vous donniez des airs de reine de beauté. Seulement voilà! Le Ciel vous a fait cadeau d'un peu enviable don: celui de vous enlaidir d'autant plus que vous vous efforcez de paraître plus belle que vous ne l'êtes, vous qui pourtant avez l'air de parler et d'agir, qui vous comportez, comme si vous aviez , depuis vos treize ans, sinon depuis toujours, déjà atteint, en matière de beauté, un niveau d'excellence inégalé et même inégalable. Vous ignorez cette vérité élémentaire: les femmes réellement et suprêmement belles doutent toujours au moins quelque peu de l'être vraiment. Il y a bien sûr des femmes qui, pour diverses raisons, ompte tenu de leurs conditions d'existence, du milieu dans lequel elles ont évolué, en sont venues à ne pas douter d'être fabuleusement belles et à faire étalage de leur beauté, à s'en montrer fières, bien qu'elles soient belles; il s'agit cependant là d'une minorité.
Mais que faut-il vous dire ou dire de vous? Pas à et de vous seule, mais également  à et de ces myriades de femmes qui, comme vous, s'imaginent que tous les hommes, et peut-être certaines femmes aussi, ne rêvent que de coucher avec vous. Que vous n'êtes pas belles? C'est fait, mais vous n'en croyez rien; qu'on ne s'intéresse à vous? Mais vous n'en voulez rien savoir et vous vous acharnez à penser que l'on ne peut que se passionner pour vous au point d'en mourir.
Réfléchissons un peu cependant: vous n'êtes pas d'une famille prestigieuse; vous n'êtes pas riche; on peut difficilement vous trouver intelligente; vous n'êtes ni instruite, ni éduquée; vous n'avez guère de classe et votre conception de l'élégance est pire qu'une plaisanterie; on aurait honte à se montrer en votre compagnie en public; est-ce à cause de tout cela que prenez cet air hautain? que vous pensez pouvoir traiter les autres avec mépris? que vous vous refusez même à ceux qui ont la sottise de vous trouver séduisante? et que vous attendez peut-être que quelque  noble et haut personnage vienne se mettre à vos pieds? Il est vrai que ça arrive parfois, mais c'est bien plus souvent dans les romans et les films.
Vous allez, ma belle, au-devant de bien cruelles déceptions et l'on n'est pas sûr que quiconque ait de la sympathie ou de la pitié pour vous. Il est encore temps de vous ressaisir; vous n'êtes pas encore vieille. Un peu de modestie vous sera bénéfique; en êtes-vous capable cependant?

Monsieur ( cette apostrophe est la seule qui s'impose, fussiez-vous une dame ou, comme on disait naguère, une demoiselle, et elle s'impose d'autant plus, Monsieur, que vous ne ressemblez en rien à Félix de Vandenesse, car ce n'est pas à vous, certainement pas à vous qu'une Henriette de Mortsauf, rencontrée dans un rêve improbable, pourrait demander: " Comment, si jeune, savez-vous ces choses-là? Avez-vous déjà été femme?", vous qui fréquentez, qui côtoyez des femmes qui eussent fait douter à Orson Welles que les femmes fussent supérieures aux hommes), n'allez vous mettre en tête qu'on vous admire ou qu'on vous envie Feriez-vous, parfois, des jaloux? Sans doute, mais parmi ceux-là seuls qui ne peuvent qu'être aussi ignobles que vous l'êtes.
Reconnaissons néanmoins que vous avez le don d'agacer et, même, d'irriter. Vous agacez et irritez les honnêtes gens, ceux qui sont vertueux. Et comme ils ne sont pas nombreux, vous n'en soupçonnez rien. Comment le pourriez-vous d'ailleurs, vous à qui l'intelligence, celle de l'esprit, non moins que celle du coeur, aura, dès la naissance même, été refusée? Vous agacez et irritez ceux qui ont acquis la faculté de s'indigner; dès fois, l'on se demanderait même s'ils ne vous méprisent. Vous agacez et irritez, parce que vous  êtes malhonnête à l'extrême, cruel comme on ne saurait l'être, plus ignoble que tous ceux qu'on a même cessé de haïr réunis, et que, malgré cela, tout semble vous sourire et réussir. Vous suscitez un tel mépris qu'on oublie que c'est précisément parce que vous êtes malhonnête, cruel, ignoble, pervers et hypocrite que tout vous réussit et vous sourit. Vous aurez bien de la chance, comme cela bien souvent à ceux de votre engeance arrive, si vous crevez avant d'avoir été reconnu et dénoncé pour le salopard que vous êtes.
Ne perdons tout espoir cependant. Le jour peut-être n'est pas loin où, seul, de tous abandonné, méprisé par vos amis et détesté par vos enfants mêmes, honni par tous et par tous ridiculisé, vous n'en finirez d'agoniser, déchiré de remords et obsédé par la crainte du châtiment de Dieu, avec pour seuls compagnons vos richesses acquises dans le sang et le souvenir épouvantable des crimes sans nombre que vous avez commis. Ce ne sera peut-être que justice; n'êtes-vous pas qu'un fumier après tout?

Monsieur, vous occupez de très hautes fonctions, lesquelles sont pour vous et (peut-être) les vôtres aussi porteuses de richesses fabuleuses et frauduleuses, synonymes de puissance abusive et immorale; vos fonctions sont pour vous, pour le salopard que vous êtes, des sources d'avantages multiples que les lois elles-mêmes n'autorisent ( et tout le monde sait ce que valent les lois dans cette société de dégénérés où triomphent et règnent des criminels de votre engeance) et que la morale, qui , pour vous et ceux de votre espèce puante, ne peut qu'avoir le sens de sa négation instantanée, condamne.
Votre femme, cette abominable créature qui n'éprouve de la nausée à serrer dans ses bras le scélérat que vous êtes, qui se couche avec enthousiasme dans le lit d'un assassin, s'habille chez les meilleurs couturiers; elle prend l'avion pour se rendre chez le coiffeur; vos enfants fréquentent les meilleures écoles, mais vous ne payez jamais, quand il vous arrive de payer, qu'avec l'argent des autres, celui des pauvres surtout, que vous, dans la crainte inconsciente  de la venue prochaine d'autres temps, ceux du châtiment, thésaurisez dans l'espoir, que l'on souhaite vain, que cela vous protège contre les ardeurs de Némésis. Vous arrive-t-il jamais de comprendre que vous vous gorgez du sang des pauvres et des démunis et que vous en nourrissez votre putain et vos enfants? Ne frémissez-vous à l'idée que vos enfants, un jour, quand vous ne serez plus là et que serez en train de pourrir sous terre, sauront que leur père était un voleur, un bandit, un assassin sans scrupule et sans vergogne? Mais non; vous en êtes incapable.




No comments:

Post a Comment