Sunday, January 4, 2015

Ce n'est que quand on est devenu tout vieux, inguérissablement vieux, que l'on se rend compte combien on a été jeune, inutilement jeune parfois, mais cette douloureuse et humiliante prise de conscience n'attend pas forcément que la vieillesse ait dégénéré en sénilité pour surprendre au milieu des frivolités et des petitesses d'une existence dont on aura cent fois déjà reconnu la fade insignifiance, elle plus cruellement frappe d'angoisse alors que, point tout à fait avancé en âge, on sent l'imminence inexorable de la perte désormais redoutée d'une jeunesse dont on n'aura su apprécier combien elle peut être aussi éphémère qu'elle est divinement précieuse, non seulement parce qu'avec les ans, avec le temps, on devient laid et que déclinent les forces tandis que s'étiolent les talents les plus médiocres eux-mêmes, les autres, les vrais s'étant depuis longtemps déjà évanouis pour n'avoir point été entretenus, mais surtout parce qu'avec le temps, on n'a plus de temps, on a moins en moins de temps, on n'a plus que le temps de vieillir et de pourrir; encore heureux si on est suffisamment lucide pour se loger une balle dans la tête, si on n'a pas su acquérir celle qui eût permis de préserver une certaine jeunesse, malgré le passage des ans.

Il y a des gens qui admirent des salauds, de véritables fumiers, qui sont prêts à se prosterner devant eux; et dire qu'il y a des génies, des héros qui sont si peu admirés, dont on ne soupçonne même pas la grandeur.

La plupart de nos devoirs, qu'ils nous soient de l'extérieur par les autres, par la tradition, par
les préjugés et les conventions imposés, qu'ils nous soient sur nous-mêmes par nous-mêmes, par nos croyances, nos fantasmes et nos angoisses dictés, sont, en fait, imaginaires; les êtres humains se compliquent l'existence pour des foutaises, des riens qui valent encore moins que des riens.

La vie n'est pas bête, ce sont les hommes qui sont cons; mais il n'y a, heureusement, pas que des hommes sur terre, il y a aussi des surhommes.

C'est surtout quand on ne comprend rien à rien qu'on risque de se croire intelligent, et cela n'a rien d'étonnant.

Un grand texte, c'est bien plus  l'oeuvre d'un grand lecteur que celle d'un écrivain, sauf quand l'écrivain est lui-même un grand lecteur.






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