Saturday, June 26, 2021

 Ne jamais plus d'une fois la même chose, le même mot écrire, telle est bien la tâche interminable, en ceci que personne ne la saurait jamais achever, quelque héroïques les efforts qui y seraient consacrés, que se fixe régulièrement tout écrivain, personnage fort rare, il est vrai - et dont le rôle est systématiquement usurpé par plus d'un bateleur d'estrade n'hésitant, forcément, car par aucun doute habité, à se targuer d'écrire, voire de penser -, si rare qu'on ne s'aperçoit même de ce qui le distingue pourtant de tout écrivassier à qui les pages des journaux font un accueil enthousiaste, confiantes de recueillir des sa plume trempée dans une encre infâme des créations toujours originales, à savoir la prodution à chaque instant de traits si nouveaux que les sots et les ignores, éblouis, n'y voient que du feu, cependat que dans son acharnement à ne faiblir dans sa détermination à se jamais céder aux facilités dont se nourrit, se gave même la populace dont l'appétit pour tout ce qui n'est que vulgaire ne connaît pas de limites, il poursuit son oeuvre, toujours incertain de réaliser l'oeuvre qu'il rêve sans cesse d'écrire et désespérant d'y à jamais parvenir, d'où l'éternel recommencement, chez lui, de ce geste, en apparence tout simple, mais en réalité toujours, dans son cas, révolutionnaire, consistant à aligner des mots, à juxtaposer des traits qu'il est comme réservé à la seule lucidité du lecteur, personnage, si possible, encore plus rare qu'on ne le pourrait soupçonner ou imaginer, de reconnaître non sans être incontinent frappé de ce doute contagieux qui provient de ce contact, en fait éphémère, peut - être même illussoire, mais surtout terrifiant, quand bien même désiré, avec telle disposition de signes, tel rythme, telle cadence, tout silence et tout suspens compris, qu'il en reculerait, captivé et épouvanté à la fois, se demandant s'il ne se serait  pas, tout comme l'écrivain et grâce à lui, aventuré là où l'impossible semblerait devenu possible, cependant que ce qui est possible trahit le malentendu sur lequel il repose pur le plaisir de plus grand nombre et l'exquise torture de quelques- uns.

On aurait bien souvent l'impression que le poète, l'écrivain, le peintre, le musicien ne font que répéter la même chose et il y a même de très grands cinéastes ou peintres qui ne craignent pas d'affirmer qu'on fait toujours le même film, qu'on peint toujours le même tableau. On en conclut que, comme on le proclame fréquemment, et non sans une certaine arrogance de surcroît, quand on aura vu un livre de tel auteur, on a déjà lu tous ceux qu'il n'a pas encore écrits et qu'il ne manquera pas d'écrire.  C'est là une inqualifiable sottise qui traîne un peu partout, et même, parfois, dans des lieux et chez des gens où l'on ne s'attendrait pas à trébucher sur des rencontres aussi désastreuses. En fait, le poète - ou l'écrivain, le peintre, le musicien, comme on voudra - ne fait jamais la même chose, même quand il fait la même chose et cela aura échappé à bien des nigauds qui ne savent pas que le même est le même sans être le même, qui ne savent pas lire. Ce que l'écrivain écrit, ce à quoi il travaille, c'est ce qu'il a pour ambition d'atteindre, c'est, sauf s'il n'est qu'un vulgaire écrivassier, l'impossible et c'est en cela qu'il est toujours entrain d'essayer, d'écrire le même livre qui, pour l'heure et à tout instant, lui demeure à lui- même mystérieux, énigmatique, inaccessible.

L'impression d'être toujours confronté à la même chose, même quand il ne s'agit pas de la même chose, relève d'un fantasme de l'individu qui croit lire, alors qu'il ne fait que s'adonner à la pratique de l'onanisme.

Il y a au moins deux manières de s'y prendre pour toujours refaire le même livre, l'une , à peine perceptible, sauf aux yeux de ceux  qui, fussent-ils de cécité frappés, savent lire, et qui consiste à toujours oeuvrer  en vue de l'oeuvre que l'on sait impossible, et l'autre qui n'est guère différente de ce qu'on pourrait appeler la production industrielle de ce qu'on croit être une oeuvre, qui répète la même chose, oarce que ça paie, ça rapporte, parce qu'on - mais qui? - en redemande.

Le livre, pourtant déjà écrit et, même, publié, ne le sera vraiment que quand il aura trouvé le lecteur idéal - parfois, souvent, son auteur lui - même -,  qui se fait toujours attendre, quand il ne léa anticipé pendant l'cte d'écrire même.

En vérité, c'est le lecteur wui véritablement écrit, en lisant et en écrivant en même temps.


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